Le démographe Sergio Della Pergola: “En Israël, la victoire est du populisme”

Par Daniel Reichel

Les résultats des élections législatives en Israël s’insèrent dans “un mouvement transnational dont font partie l’Italie, la France, l’Angleterre, la Suède, les Etats-Unis ainsi que le Brésil, avec son résultat surprenant mais dans la direction opposée. Ce mouvement rassemble en lui et ressuscite le nationalisme, le populisme, le chauvinisme et le revanchisme”. Sergio Della Pergola, célèbre démographe italien, explique au Pagine Ebraiche qu’il s’agit d’un phénomène global qui en Israël a eu – lors de ces dernières élections – sa mise en place en fonction des caractéristiques du Pays. Notamment avec l’affirmation du parti sioniste religieux d’extrême droite. Ce dernier fait partie de la coalition, guidée par Benjamin Netanyahu, qui a remporté la victoire (64 sièges sur 120).
C’est le vote du peuple et le résultat est incontestable. Le taux de participation a été très élevé, parmi les plus élevés de ces deux dernières décennies. Et toutes ces personnes, qui auparavant s’abstenaient, étaient manifestement et clairement alignées sur le Likoud et les partis religieux”.
Le résultat des législatives – souligne Della Pergola – récompense ceux qui, comme Netanyahu, ont su gérer habilement une loi électorale qui favorise la fragmentation, en resserrant les rangs de leur coalition et en évitant la dispersion des votes. “Netanyahu est le meilleur homme politique d’Israël. Il n’y a aucun doute sur cela, et les autres politiciens sont désastreux”. Après, Della Pergola fait explicitement allusion aux laboristes et au Meretz: ils n’ont pas conclu un accord pour créer une coalition et, par conséquent, maintenant Meretz n’a obtenu aucun siège à la Knesset.
“Mais on paye les pots que l’on casse… Les partis arabes ont également fait cette sottise. Ils se sont divisés en deux et puis en trois, donc maintenant l’un des trois ne franchit pas le seuil pour obtenir un siège au Parlement. Et dans ce cas je dirais heureusement – ajoute le démographe – car Balad (le parti qui n’atteindrait pas le seuil) est carrément anti-israélien et absolument contraire à l’existence de l’Etat d’Israël. Donc c’est mieux s’il n’obtient aucun siège.”
D’autre côté, en ce qui concerne ceux qui ont réussi à entrer dans la Knesset, Della Pergola voit la représentation d’un Pays qu’il ne reconnaît pas. “Aujourd’hui, Israël est un État complètement différent par rapport à l’époque de Ben Gurion” affirme le démographe qui a été, au cours de sa carrière, le conseiller stratégique du premier ministre Ariel Sharon. “En Israël actuellement il y a des forces qui peuvent être identifiées aux mouvements fascistes présents dans d’autres Pays. – détaille Della Pergola – Et à qui devons-nous ce cadeau? Pour la plupart aux Palestiniens et au fait qu’ils n’ont jamais voulu adopter une position nette de dialogue, de rencontre, de coexistence. Leur terrorisme a clairement éloigné les pacifistes. Après, malheureusement, entre les terroristes palestiniens et les fondamentalistes israéliens juifs est née une alliance perverse qui, dans le passé comme dans ce cas, a fonctionné remarquablement”.
Della Pergola rappelle en particulier le passé kahaniste d’Itamar Ben Gvir et son célèbre geste contre Yitzhak Rabin, Premier ministre israélien de l’époque auquel Ben Gvir a arraché l’insigne de la Cadillac. “On est arrivés à sa voiture. On arrivera jusqu’à lui aussi” annonça en télévision Ben Gvir, qui à l’époque avait vingt ans. Presque trente ans après, “ces gens sont au gouvernement. On verra comment ils se comporteront. Mais je crois que l’extrémisme de Ben Gvir et Smotrich (l’autre leader du parti sioniste religieux) est tel qu’il pourrait mettre Netanyahu en difficulté”.
La coalition guidée par l’ex premier ministre – poursuit Della Pergola – a annoncé que sa priorité est de faire une réforme avec laquelle déclarer “la prévalence du Parlement sur la Cour Suprême, pour empêcher cette dernière de rejeter les lois proposées par le Parlement. Certes, ensuite les procédures de nomination des juges seront discutées, et l’ordre de la séparation des pouvoirs pourra être complètement bouleversé. Avec une majorité comme celle qui se profile, ils déclareront d’agir selon ce que le peuple a décidé et ils changeront la démocratie. Bien sûr, certains diront que je suis seulement pessimiste. Mais ce sont les signes que je vois à me dire cela.”

Traduction de Margherita Francese, révisée par Sofia Busatto, étudiantes à l’École Supérieure de Langues Modernes pour les Interprètes et les Traducteurs de l’Université de Trieste, stagiaires dans le bureau du journal de l’Union des communautés juives italiennes – Pagine Ebraiche.